Le secrétaire d'Etat à l'immigration britannique a rencontré son homologue français mardi à Paris pour organiser une réponse commune à l'afflux de candidats à la traversée de la Manche. Londres prépare déjà une unité militaire d'intervention.
Le Royaume-Uni ne fait pas dans la dentelle pour « reprendre le contrôle des frontières » - dont il était déjà souverain avant le Brexit. A l'issue d'une réunion « constructive » entre Chris Philp, secrétaire d'Etat à l'immigration britannique et son homologue français mardi, Londres et Paris ont annoncé vouloir coopérer pour empêcher toute immigration clandestine. Un discours officiel consensuel loin des informations publiées par la presse britannique avant la rencontre. Concrètement, Londres souhaite créer une unité militaire d'intervention dans la Manche et Paris demande 30 millions de livres (33 millions d'euros) supplémentaires pour renforcer les contrôles, selon le « Sunday Telegraph ».
« Le gouvernement français partage la volonté des Britanniques de rendre la Manche'impraticable'pour les traversées clandestines »,s'est réjoui Chris Philp. Il a également précisé qu'il était « trop tôt pour se prononcer sur des engagements financiers entre Paris et Londres ».
Le flux des migrants qui traverse la Manche s'est intensifié : depuis le début de l'année, 4.192 personnes ont tenté de traverser ou traversé la Manche, contre 2.294 sur l'ensemble de l'année 2019. Selon le ministère français de l'Intérieur, cette forte augmentation s'explique par des conditions météorologiques clémentes et une mer calme.
Demandes Britanniques
Dans une tribune publiée dans, Chris Philp demande un renforcement des interceptions conséquent. Autre requête phare : prendre les empreintes digitales des migrants interceptés afin qu'ils puissent être déportés dans le premier pays dans lequel ils sont arrivés ou arrêtés pour avoir enfreint la loi. En effet, les accords de Dublin disposent que les migrants doivent demander l'asile dans le premier pays sûr dans lequel ils arrivent.
Jusqu'à présent, les autorités françaises ne faisaient qu'accompagner les embarcations clandestines jusqu'à l'Angleterre. Ces mesures ne sont pas du goût de Chris Philp, qui a annoncé l'intensification des procédures de renvois vers la France. Sa collègue Priti Patel, ministre de l'Intérieur, a même fait une annonce choc : à sa demande, un partenariat entre la police aux frontières britannique et la Navy a développé un filet capable d'enrayer les hélices des moteurs de bateaux, pour forcer l'arrêt de ces derniers. L'escalade ne s'arrête pas là : un ancien militaire de la marine royale, posté en Iraq et au Kosovo, a été nommé à la tête du commandement de « menace clandestine de la Manche ». Le gouvernement souhaite que des bateaux de la Navy patrouillent dans ces eaux au nom de cette nouvelle unité.
Traité du Touquet
Actuellement, la frontière franco-britannique est gérée par les accords du Touquet , entrés en vigueur en 2004. Ils prévoient que les contrôles aux frontières de chaque pays s'effectueront dans le pays opposé. Le problème de l'immigration clandestine au Royaume-Uni est donc depuis à la charge des Français - littéralement. Le gouvernement britannique paie en conséquence la France pour empêcher des migrants clandestins de traverser.
La BBC rapportait en 2018 qu'une enveloppe de près de 150 millions de livres avait été dédiée à la sécurité dans la région, dont 100 millions sur les trois années précédentes. Cet argent avait permis d'installer plus de grillages et de caméras de surveillance. Paris demande désormais une rallonge de 30 millions de livres.
Les accords de Dublin étant un texte européen, une zone d'ombre se dessine. Une fois la période de transition terminée, quel texte gouvernera l'immigration dans cette zone ? Boris Johnson veut rassurer. Il a annoncé lundi vouloir changer les lois d'asile pour décourager la venue de migrants. En somme, cette farandole de mesures, bien que spectaculaire, ne traiterait pas le problème à l'une de ses sources : les réseaux de passeurs qui sévissent côté français.
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